Tour de Lombardie: Pogacar, le retour du cannibale
Deuxième du Tour de France cet été, Tadej Pogacar a conclu sa saison avec maestria en remportant le Tour de Lombardie, son deuxième Monument de l'année, après un raid solitaire extraordinaire samedi à Bergame.
On avait laissé le Slovène en détresse dans les Alpes sur le Tour de France, victime de la pire défaillance de sa carrière dans le col de la Loze. Il avait réagi en champion en remportant quelques jours plus tard l'étape du Markstein, une première résurrection suivie d'une belle troisième place en août aux Mondiaux à Glasgow.
Samedi, malgré des crampes aux deux jambes, il est redevenu le cannibale, muselé au printemps par une fracture au poignet, qui gobe tout sur son passage pour signer la 63e victoire de sa carrière, à seulement 25 ans.
C'est déjà son sixième Monument, l'une des cinq plus grandes classiques du cyclisme, le deuxième en 2023 après le Tour des Flandres où il s'était également envolé pour une chevauchée solitaire en avril. Et il devient le premier coureur depuis Fausto Coppi en 1949 à remporter Il Lombardia trois fois de suite, un exploit seulement réalisé par un autre homme, l'Italien Alfredo Binda dans les années 1920.
- "Fabuleux" -
"Gagner trois fois en trois participations c'est juste extraordinaire. En plus je gagne en solo... c'était fabuleux. J'ai savouré les deux derniers kilomètres même si j'avais très mal aux jambes", a-t-il commenté à l'arrivée.
Le prodige de l'équipe UAE continue d'affoler les compteurs avec ce 17e bouquet en 2023, le meilleur total de tout le peloton. Il boucle une année riche avec aussi à son palmarès la Flèche Wallonne, l'Amstel Gold Race ou encore Paris-Nice.
Un tableau de chasse qui en fait un candidat naturel pour le trophée de meilleur coureur de la saison avec Mathieu van der Poel, champion du monde et vainqueur comme lui de deux Monuments (Milan-Sanremo et Paris-Roubaix), ainsi que Jonas Vingegaard, vainqueur du Tour de France et deuxième de la Vuelta, tous deux absents samedi.
Sur la route de Bergame, sous un magnifique soleil d'automne drapant d'or les paysages enchanteurs de Lombardie, Pogacar aura été le meilleur sans contestation possible, après s'être fait la malle dès les premiers lacets de la descente du Passo di Ganda, la dernière ascension du jour, à une trentaine de kilomètres de l'arrivée.
- La fête à Pinot -
Au pied de la descente, il a commencé par se taper les cuisses, saisi par un début de crampes. "A droite, puis à gauche. A ce moment-là je me suis dit: c'est cuit. Mais je me suis accroché, j'ai réduit un peu la puissance et j'ai pu finir. Le fait que derrière ils ne collaboraient pas très bien m'a aidé aussi", a-t-il raconté.
Le groupe de chasse de six coureurs n'a jamais réussi à recoller et Pogacar a franchi la ligne les bras écartés, avec 52 secondes d'avance sur l'Italien de la Soudal-Quick Step Andrea Bagioli et le Slovène Primoz Roglic, l'autre grand favori.
Le Belge Remco Evenepoel est arrivé neuvième dans un deuxième groupe de poursuivants, le coude gauche ensanglanté après une violente chute en début d'étape.
La journée a été marquée par les adieux de Thibaut Pinot qui, pour la dernière course de sa carrière, a été mis à l'honneur par les organisateurs en s'élançant en première ligne, sous les applaudissements de Tadej Pogacar et de tous les cadors du peloton.
Le Français, 37e au final, a lâché dans la dernière ascension, avant d'être acclamé par les centaines de supporters venus lui dire adieu dans la "curva Pinot" noyée sous les fumigènes, puis devant le bus de son équipe.
"Ca y est c'est fini, c'était un truc de fou, je ne suis pas champion du monde mais j'ai le meilleur public du monde", a savouré le désormais néo-retraité de 33 ans.
O.Esposito--IM