Sur les traces de Donnarumma, le feu sacré au pied du Vésuve
Le Vésuve est majestueux, vu de ce modeste terrain de football de la région napolitaine; mais seuls le ballon et la cage à défendre intéressaient le "petit" Gianluigi Donnarumma, racontent ceux qui ont vu le gardien italien du Paris SG y faire ses premiers plongeons.
"Il a commencé ici, sur ce terrain. Il venait voir l'entraînement de son grand frère (Antonio, lui aussi devenu gardien professionnel, ndlr) et il se mettait aussi dans le but à faire des parades", décrit à l'AFP Ciro Amore.
Le président de l'école de football ASD Napoli en a vu défiler des journalistes sur cette pelouse synthétique qui longe une voie rapide, à Castellamare di Stabia. Une ville de la baie de Naples, à un jet de pierre du volcan endormi et du site de Pompei, où le héros de l'Euro 2020 a arrêté ses premiers penalties.
Mais le sexagénaire ne se lasse jamais de conter les débuts du "Gigione", dont il montre avec fierté les premières licences, signées d'une écriture enfantine, les photos et les maillots envoyés par la star de 23 ans qui espère rester titulaire mercredi en Ligue des Champions, chez le Real Madrid, après avoir été préféré à Keylor Navas à l'aller.
"Il n'avait que quatre ans et demi et ne pouvait pas faire partie d'une équipe, mais on a commencé à le faire participer aux entraînements. Il n'a jamais eu peur de qui que ce soit. Il avait déjà un physique différent, il était assez grand. On voyait qu'il avait toutes les caractéristiques d'un grand gardien", reprend le président.
- "Père" et "ami" -
"Les qualités techniques, oui, mais il en avait d'autres, notamment son caractère. Il n'était jamais fatigué de jouer et de s'entraîner", renchérit Angelo Panariello, entraîneur dans ce club où le portier du PSG a usé ses gants jusqu'à 14 ans, avant de partir grandir chez les jeunes de l'AC Milan.
Devenu titulaire du club rossonero à seulement 16 ans et demi, et ce jusqu'à son départ pour Paris l'été dernier, Donnarumma doit notamment beaucoup au préparateur local des gardiens, Ernesto Ferraro.
Outre les frères Donnarumma, Ferraro a formé d'autres gardiens ayant évolué en Serie A: Gennaro Iezzo, passé par Naples, et Antonio Mirante, encore troisième gardien à Milan.
"Si aujourd'hui j'ai réalisé mon rêve de fouler la pelouse de San Siro, je le dois surtout à toi", lui avait rendu hommage Donnarumma, au moment de son décès en décembre 2018.
"Merci pour avoir été un guide précieux, un père, un ami. Tu venais me prendre à la maison, qu'il pleuve, qu'il vente, pour m'emmener aux entraînements, aux matches, aux tests", avait-il écrit sur Instagram.
"Ernesto me disait toujours: Gigione n'arrivera pas seulement en Serie A, mais aussi en Nazionale, parce que dès que je lui dis quelque chose, il le retient", rapporte Angelo Panariello.
- Derby milanais -
"Son seul problème, qui peut être une qualité, c'est qu'il ne voulait jamais perdre. Quand il perdait, il était furieux et s'en prenait à nous en nous disant qu'on s'était trompé dans la composition!", s'amuse l'ex-entraîneur.
Déjà haut de plus d'1,90 mètre, le jeune gardien ne passe pas longtemps inaperçu et le président est pressé de demandes sur le "phénomène": "Il m'arrivait chaque semaine des appels: où joue-t-il ? à quelle heure ?"
Le plus difficile pour le fils de charpentier sera de choisir entre les deux clubs milanais, à en croire Ciro Amore.
"Le premier club intéressé était l'Inter. Le responsable des jeunes est venu ici, dans le bureau, discuter avec le père. Nous sommes même allés à Milan signer un pré-contrat avec l'Inter", dit-il.
Mais le choix familial s'est finalement porté sur le club rival, où le frère Antonio (neuf ans plus âgé) évoluait déjà.
Selon divers médias, l'AC Milan aurait versé quelque 250.000 euros pour attirer l'espoir Gianluigi. "Les 200.000 ou 300.000 euros dont on parle, je ne sais pas où ils sont allés ! Nous, en tant que club, on n'a touché que 25.000 euros", assure Ciro Amore.
Donnarumma n'a pas eu l'occasion de fouler cette pelouse depuis des années, mais il est revenu l'été dernier faire une visite à ses parents, toujours installés à quelques kilomètres dans une maison entre Castellammare et Pompei. Avec autour du cou la précieuse médaille de champion d'Europe et plus que jamais, au fond de lui, le feu sacré.
L.Sabbadin--IM