Ukraine: Zelensky accuse les Russes "d'atrocités" à Kherson
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a accusé les forces russes d'avoir commis des "atrocités" à Kherson, quelques jours après la reprise de la ville par les Ukrainiens.
"Les corps des tués sont retrouvés: ceux de civils et de militaires. Dans la région de Kherson, l'armée russe a laissé derrière elle les mêmes atrocités que dans d'autres régions de notre pays, où elle a pu entrer", a dit M. Zelensky dimanche soir lors de son allocution quotidienne.
Il a ajouté que 400 "crimes de guerre" russes avaient été documentés, sans préciser s'ils concernaient uniquement la région de Kherson.
Nombre d'habitants de la ville ont dit à l'AFP sur place que les forces russes, qui ont achevé d'évacuer la ville vendredi après huit mois de présence, y ont semé la désolation.
"Ils ont pillé tous les appartements, ils ont détruit les portes, ils vivaient dans les appartements. Ils ont pris tout le matériel électronique. Ce sont des voleurs", enrage Svetlana Vilna, 47 ans, qui dit s'être "sentie comme en prison pendant neuf mois".
Un étudiant en philosophie trentenaire, qui dit se prénommer Andrïi, assure que "maintenant nous n'avons pas d'électricité dans la ville, pas d'eau, pas de chauffage central, pas de connexion mobile, pas de connexion internet mais nous n'avons pas de Russes, et j'en suis extrêmement heureux".
- Grand soulagement -
Le président Zelensky avait accusé samedi soir les Russes d'avoir détruit les infrastructures essentielles avant de fuir.
"Nous sommes en train de rétablir les communications, internet, la télévision et nous faisons tout notre possible pour restaurer la fourniture d'électricité et d'eau aussi vite que possible", a-t-il déclaré dimanche.
Dans ce chaos énergétique et logistique, la liesse prédominait depuis vendredi. Drapeaux ukrainiens, accolades avec les soldats de Kiev, klaxons et sifflets égayaient encore la ville dimanche, a constaté l'AFP.
On pouvait aussi voir des véhicules militaires détruits, des bâtiments mutilés, et sentir une odeur de bois brûlé dans ce port stratégique de la mer Noire, où la guerre faisait rage il y a encore quelques jours. Dimanche, la population exprimait surtout un grand soulagement de voir l'occupant parti.
Alors que des queues s'étirent devant des postes de distribution de nourriture et d'aide d'urgence, de nombreux adultes et enfants se déplacent dans les rues enveloppés dans des drapeaux bleu et jaune.
Certains sont réunis sur la place principale de la ville, en vue de communiquer avec leurs proches via le service internet par satellite Starlink, propriété d'Elon Musk, le patron de Tesla et Twitter.
"J'ai besoin de reprendre contact avec ma famille", explique Klavdia Mych, une enseignante à la retraite âgée de 69 ans. "Nous n'avons pas d'eau depuis une semaine, ajoute-t-elle. Et ils disent que tout est miné: ça fait peur".
Sur Facebook, Oleksandr Todortchouk, fondateur de UAnimals, un mouvement pour les droits des animaux, affirme que les occupants sont partis en emmenant avec eux "la plupart des animaux du zoo en Crimée [territoire ukrainien annexé par Moscou en 2014], des lamas aux loups en passant par les écureuils.
Après les revers militaires successifs de l'armée russe depuis l'été, le retrait russe de Kherson est une humiliation d'autant plus grande pour le Kremlin que la région de cette grande ville est l'une des quatre annexées par la Russie en violation du droit international à la suite de son invasion de l'Ukraine, le 24 février.
Il s'agit du troisième repli d'ampleur russe depuis le début de la guerre, la Russie ayant renoncé au printemps à prendre Kiev face à la résistance acharnée des Ukrainiens, avant d'être chassée de la quasi-totalité de la région de Kharkiv (nord-est) en septembre.
- "Lignes de défense supplémentaires" -
Les forces armées ukrainiennes ont repris le contrôle de dizaines de localités dans la région de Kherson, qui avait été la première grande ville à tomber après l'invasion russe.
Après l'évacuation de Kherson, sur la rive occidentale du Dniepr, un ordre d'évacuation vers la région russe de Krasnodar, près de la Crimée, a été lancé par les autorités locales prorusses samedi soir à l'attention de leurs employés du district de Kakhovka, sur la rive orientale du fleuve.
Dans la nuit de dimanche à lundi, le commandement sud de l'armée ukrainienne a affirmé que les forces russes continuaient à "mettre en place une défense sur la rive gauche du Dniepr" et "des lignes de défense supplémentaires à plusieurs niveaux pour tenir les frontières occupées".
Moscou "continue d'infliger des dommages par le feu à nos troupes et aux localités libérées le long de la rive droite du Dniepr en utilisant aviation, artillerie lourde, MLRS (lance-roquettes, ndlr) et mortiers", a-t-il ajouté.
Sur le plan diplomatique, la secrétaire américaine au Trésor Janet Yellen a estimé lundi, à la veille du sommet du G20 en Indonésie, que mettre fin à la guerre en Ukraine était "tout simplement la meilleure chose à faire pour l'économie mondiale".
L'invasion lancée il y a neuf mois par le président russe Vladimir Poutine a de profondes répercussions économiques, avec l'envolée des prix de l'énergie et des produits alimentaires.
Officiellement, l'invasion de l'Ukraine ne figure pas à l'agenda du club des 20 grandes économies dont les dirigeants se retrouvent mardi et mercredi sur l'île indonésienne de Bali. Moscou a d'ailleurs appelé le G20 à se concentrer sur les questions économiques et financières plutôt que politiques et sécuritaires.
I.Pesaro--IM