Brésil: Lula et Bolsonaro se rendent coup pour coup au 1er débat
"Petit dictateur", "honte nationale": les attaques ont fusé entre Lula et Jair Bolsonaro dimanche, lors du premier débat télévisé mettant face à face les deux adversaires du second tour de la présidentielle brésilienne, dans deux semaines.
Ce débat, qui a duré moins de deux heures sur la chaîne Bandeirantes, a été houleux par moments, mais le ton a été cependant moins agressif que lors de ceux qui avaient eu lieu avant le premier tour, en présence d'autres candidats.
L'ex-président de gauche Luiz Inacio Lula da Silva (2003-2010) s'est montré plus à son avantage au début, avec notamment de dures accusations de "négligence" de M. Bolsonaro durant la pandémie de Covid-19.
Mais le chef de l'Etat actuel d'extrême droite s'est repris vers la fin, avec des piques sur le thème de la corruption, notamment le vaste scandale autour de la compagnie pétrolière publique Petrobras.
"Lula, tu devrais rentrer chez toi, profiter de la vie, plutôt que de revenir sur la scène du crime. Tu es une honte nationale!", a lancé Jair Bolsonaro, a fustigeant la "corruption en abondance au Brésil" durant les deux mandats de son adversaire.
Lula, pour sa part, n'a pas hésité à traiter le président sortant de "petit dictateur", l'accusant notamment de vouloir augmenter le nombre de juges de la Cour suprême pour affaiblir le pouvoir judiciaire.
Mais ses attaques les plus virulentes ont porté sur la gestion de la crise sanitaire.
"A cause de votre négligence, plus de 680.000 personnes sont mortes de Covid au Brésil, tandis que plus de la moitié auraient pu être sauvées", a lancé l'ex-président de gauche, évoquant notamment les retards dans l'achat de vaccins.
- "Fayot" -
"Lula, arrêtez de mentir, un homme de votre âge!", a par la suite lâché Jair Bolsonaro, 67 ans.
"C'est vous le roi des fausses informations, le roi de la stupidité", a rétorqué Lula, 76 ans.
Jair Bolsonaro a par ailleurs accusé l'ancien métallo de "ne pas avoir la moindre préoccupation envers les plus pauvres", se félicitant d'avoir fait approuver des dépenses exceptionnelles élevant à 600 réais (environ 97 euros) mensuels les allocations versées aux familles les plus humbles.
Mais le débat, avec un nouveau format qui permettait aux deux candidats de circuler librement dans le studio, a également été marqué par des moments d'humour.
Après un silence gênant, Jair Bolsonaro, souriant, a posé brièvement sa main sur l'épaule de Lula.
Dans la foulée, ce dernier a affirmé que son adversaire était son "fayot" avant de devenir son ennemi juré: "on m'a montré plein de discours de vous parlant de moi en bien quand vous étiez député et moi président".
Lula a obtenu 48,3% des voix au premier tour, contre 43,2% pour le président d'extrême droite.
La campagne électorale a été marquée par des attaques virulentes entre les candidats et leurs entourages, qui n'ont pas hésité à se lancer des accusations de cannibalisme, pédophilie ou liens avec le crime organisé.
- Subtile provocation -
Jair Bolsonaro a été fustigé samedi par l'opposition de gauche pour avoir raconté qu'une "atmosphère s'était crée" quand il avait rencontré dans la rue de jeunes Vénézuéliennes mineures dans un quartier pauvre de Brasilia, laissant entendre qu'elles étaient des prostituées.
Face au déluge de critiques suscitées par ces déclarations, le président brésilien a assuré avoir "toujours combattu la pédophilie".
Lula, lui, a joué la provocation en portant sur sa veste de costume une broche avec le logo d'une campagne contre les abus sexuels d'enfants et d'adolescents.
Le président du Tribunal supérieur électoral, Alexandre de Moraes, a ordonné dimanche que les vidéos associant Jair Bolsonaro à la pédophilie soient retirées des principales plateformes de réseaux sociaux, les propos du président étant, selon lui, "sortis de leur contexte".
Lula remporterait le second tour de la présidentielle, qui aura lieu le 30 octobre, avec 53% des votes exprimés contre 47% pour Jair Bolsonaro, selon un sondage Datafolha publié vendredi.
Le second tour s'annonce très disputé dans cette élection extrêmement polarisée et les deux candidats se sont évertués à rallier les soutiens politiques et à tenter de convaincre les indécis en poursuivant une intense campagne dans tout le Brésil.
Les divers instituts de sondage ont été très critiqués pour ne pas avoir anticipé le score élevé du président sortant, auquel ils attribuaient un maximum de 37%, au 1er tour.
A.Bruno--IM