Après un mois au pouvoir, Liz Truss déterminée à sortir le Royaume-Uni "de la tempête"
Déjà affaiblie après tout juste un mois au pouvoir, la Première ministre britannique Liz Truss a tenté de reprendre l'ascendant mercredi, au dernier jour d'un congrès du parti conservateur miné par les dissensions internes sur la politique à mener pour sortir le Royaume-Uni de la crise.
"Dans ces temps difficiles, nous devons agir. Je suis déterminée à faire avancer le Royaume-Uni pour nous sortir de la tempête", a lancé Mme Truss, dans un discours sans annonce d'un peu plus d'une demi-heure devant les élus et militants de son parti réunis à Birmingham (centre de l'Angleterre).
Avec la volonté de renouveler un pouvoir conservateur à la tête du pays depuis 12 ans, la Première ministre a affirmé vouloir "en finir avec le cycle de faible croissance" et martelé son objectif de faire "croître l'économie britannique". "Le statu quo n'est pas une option", a-t-elle insisté dans un discours introduit par un tube des années 1990, "Moving on up".
A la tribune, elle s'en est prise à ce qu'elle a appelé la "coalition anti-croissance" regroupant partis d'opposition, syndicats et organisations écologistes.
Interrompue brièvement par des militants de l'ONG Greenpeace protestant contre la fin du moratoire sur la fracturation hydraulique décidée par son gouvernement, Mme Truss a longuement réaffirmé le soutien du Royaume-Uni à l'Ukraine dans sa guerre face à la Russie.
La Première ministre a aussi défendu une nouvelle fois son approche budgétaire "responsable", alors que son "mini-budget" présenté le 23 septembre pour faire face à la crise du coût de la vie a suscité une foule de critiques cinglantes pour ses baisses d'impôts financées par la dette, et fait chuter la livre sterling.
Sous la pression de sa propre majorité, le gouvernement a renoncé lundi à supprimer la tranche d'imposition la plus élevée, une volte-face en plein congrès qui a affaibli la Première ministre.
Chez les militants présents au congrès, le discours semble avoir rassuré. Il était "bien mieux que ce à quoi je m'attendais", a déclaré à l'AFP Debbie Richard, une élue locale de 66 ans du Suffolk (est de l'Angleterre), qui était "inquiète" après la volte-face de lundi.
Ce discours suffira-t-il à réaffirmer l'autorité de la Première ministre, quand la ministre de l'Intérieur Suella Braverman a accusé mardi les conservateurs ayant ouvertement critiqué Mme Truss d'avoir lancé un putsch contre elle?
L'ancien ministre des Transports Grant Shapps, qui avait soutenu l'ex-ministre des Finances Rishi Sunak contre Mme Truss dans la course à Downing Street, a averti que les députés du parti ne resteraient pas "sans rien faire" si les sondages restent calamiteux.
Une étude YouGov publiée juste avant le discours donne à Liz Truss une cote de popularité plus basse encore que le pire score de son prédécesseur Boris Johnson. Seuls 14% des sondés ont une opinion favorable de la dirigeante conservatrice.
- Avertissement -
Quantité de dossiers minés attendent encore le gouvernement et pourraient alimenter la fronde, comme la suppression de la tranche maximale d'imposition pour les plus riches, que Liz Truss s'est refusée à abandonner définitivement après l'avoir écartée de son "mini-budget".
Mais la colère couve surtout sur la future revalorisation des prestations sociales, à propos de laquelle le nouveau gouvernement ne se juge pas lié par l'engagement pris par Boris Johnson de les augmenter à hauteur de l'inflation.
Plusieurs autres voix se sont élevées au sein de la majorité pour rappeler à Liz Truss de ne pas trop s'éloigner du programme de Boris Johnson, qui avait valu en décembre 2019 aux conservateurs un triomphe inédit depuis Margaret Thatcher, Première ministre de 1979 à 1990.
Les prochaines élections sont attendues dans moins de deux ans et l'opposition travailliste est ressortie revigorée de son congrès fin septembre.
"Les Tories refusent toujours d'abandonner leur budget kamikaze qui a fait éclater l'économie", a tweeté le leader travailliste Keir Starmer.
Un récent sondage donnait 33 points d'avance aux travaillistes par rapport aux conservateurs, un écart inédit depuis la fin des années 1990 et l'arrivée au pouvoir de Tony Blair (1997-2007).
J.Romagnoli--IM