

Economies: le gouvernement prépare les esprits et réveille les oppositions
LFI et le RN évoquent à nouveau lundi la menace de la censure après l'annonce par le gouvernement d'un effort de 40 milliards d'euros pour le budget 2026 qui fera l'objet d'une conférence mardi, prélude à un long "dialogue" pour faire émerger un "consensus" improbable.
Dimanche, le ministre des Finances Eric Lombard a mis les pieds dans le plat en annonçant un effort "de 40 milliards d'euros" l'an prochain, sous forme "essentiellement" d'économies, pour réduire le déficit public de 5,4% du PIB - objectif 2025 - à 4,6% en 2026.
L'exécutif veut préparer les esprits à une France "en état d'alerte budgétaire". Mardi, François Bayrou réunira une conférence sur les finances publiques avec des parlementaires, des organismes de sécurité sociale ou encore des collectivités locales.
Mais pas d'annonce immédiate à attendre, si ce n'est la création de groupes de travail pour identifier les économies.
La conférence servira "à la fois à dire où on en est et où on veut aller. Après, il y aura trois mois, trois mois et demi, de mise au point, d'avancée, vers des décisions", a expliqué le Premier ministre au journal Le Parisien.
Du "dialogue avec toutes les parties prenantes" et destiné à faire émerger "un consensus", selon M. Lombard.
"Quarante milliards, c'est l'écart par rapport à la trajectoire naturelle du budget. Une autre façon de le dire, c'est que nous allons légèrement baisser la dépense publique, très légèrement, par rapport à son niveau de 2025", a-t-il relativisé lundi.
Mais point de consensus en vue. Au contraire, cette perspective a fait bondir, pour des raisons opposées, les oppositions qui remettent la censure sur le tapis.
Le Rassemblement national se dit favorable à des économies mais refuse qu'elles visent "les Français".
"Si le projet, c'est de demander aux Français de se serrer la ceinture sans que l'État n'aille sur le chemin des économies en matière d'immigration, de train de vie de l'État, des collectivités, nous nous emploierons à le censurer", a prévenu son vice-président Sébastien Chenu.
- Récession -
A l'inverse, la gauche s'inquiète de "l'impact récessif" de nouvelles économies sur une croissance déjà fragilisée par les incertitudes liées à la politique protectionniste des Etats-Unis.
"Il faut que cet effort soit calibré de telle manière à ne pas aboutir à une récession supplémentaire de celle résultant du contexte international", a alerté l'ancien Premier ministre socialiste Bernard Cazeneuve.
A l'autre bout de la gauche, Jean-Luc Mélenchon (LFI) s'est indigné que "le peuple de France soit traité comme la Grèce en 2010", contrainte à une sévère cure d'austérité.
Et la gauche de s'insurger que le gouvernement refuse toujours d'envisager des hausses d'impôt pour les plus riches.
"Il y a 80 milliards d’économies à faire en revenant sur les cadeaux fiscaux depuis 2017", a réagi le Premier secrétaire du PS Olivier Faure.
La gauche a fait notamment adopter à l'Assemblée nationale une proposition de loi visant à instaurer un impôt plancher sur le patrimoine des "ultra-riches" afin de s'assurer qu'ils payent au moins 2% de leur fortune en impôt. Ce texte, inspiré par les travaux de l'économiste Gabriel Zucman, sera débattu au Sénat à majorité de droite en juin.
Mais la gauche reste divisée sur l'opportunité de censurer rapidement le gouvernement.
Si LFI est "prête" à déposer une nouvelle motion de censure "dans les jours qui viennent", selon son coordinateur Manuel Bompard, le mouvement ne le fera qu'avec "la garantie qu'au moins les députés de gauche la votent".
Dans son collimateur, les socialistes qui avaient refusé de voter la censure sur le projet de budget 2025 et permis ainsi à François Bayrou de se maintenir. Dans la configuration de l'Assemblée nationale, une motion de censure ne peut en effet être adoptée que si une partie des socialistes la votent avec le reste de la gauche et le RN.
Mais avant de se prononcer, les socialistes veulent attendre, officiellement l'issue du conclave sur les retraites, et officieusement celle de leur propre congrès à la mi-juin à Nancy.
Comme l'exécutif envisage de ne pas convoquer de session extraordinaire du Parlement en juillet, cela pourrait renvoyer la question de la censure à l'automne... au moment des débats budgétaires.
L.Amato--IM