

Zimbabwe: de petits groupes de manifestants anti Mnangagwa bravent les autorités
Quelques petits groupes de manifestants ont bravé les avertissements des autorités zimbabwéennes et se sont brièvement rassemblés lundi dans la capitale Harare sous tension pour réclamer le départ du président Mnangagwa.
Ils répondaient à l'appel lancé par un ancien combattant de la guerre d'indépendance et ancien cadre du parti au pouvoir, la Zanu-PF, révélateur des tensions nourries par l'hypothèse d'un maintien d'Emmerson Mnangagwa au pouvoir après la fin de son mandat en 2028.
Le chef de l'Etat de 82 ans, surnommé "le crocodile" pour son caractère impitoyable et sa ruse politique, est confronté à une contestation d'un niveau inédit depuis son arrivée au pouvoir il y a huit ans, dans un contexte de colère populaire croissante face aux graves difficultés économiques.
La police était déployée en force lundi à Harare et dans la seconde ville du pays, Bulawayo, où les entreprises et les administrations étaient fermées, dans un pays où le souvenir du coup d'État de 2017, au cours duquel M. Mnangagwa, a pris le pouvoir à Robert Mugabe, reste vif.
Dans la capitale, un petit groupe de manifestants a tenté de se rassembler sur la place du président Robert Mugabe, également appelée place de la Liberté, mais a été dispersé par les forces de l'ordre, avec des gaz lacrymogènes notamment, selon des vidéos postées sur les réseaux sociaux.
"C'était annoncé comme une marche pacifique mais la police commence déjà à frapper les gens", a déclaré une manifestante au média en ligne CITE. Mais "on ne s'en ira pas... Je reste ici, et si je dois mourir, cela sera pour le bien de mes enfants", a-t-elle ajouté.
Plus tard dans la journée, des dizaines de jeunes ont lancé des pierres sur une route habituellement très fréquentée à proximité et scandé "Nous ne voulons pas de 2030", avant d'être dispersés par la police, a déclaré un témoin à l'AFP.
Les soupçons que M. Mnangagwa manœuvre pour rester en poste jusqu'en 2030, voire au-delà, nourrissent la colère de certains au Zimbabwe, au moment où le pays est englué dans une grave crise économique imputée à la corruption et à la mauvaise gestion du gouvernement.
- Craintes de mutinerie -
Le visage public de la dissidence est un vétéran de guerre d'indépendance, Blessed Geza, ancien cadre de la Zanu-PF dont il a été exclu en mars, et qui vit aujourd'hui caché.
Dans une vidéo postée la semaine dernière sur les réseaux sociaux, Blessed Geza, en treillis, a appelé la population à manifester dans la rue ce lundi pour réclamer le départ du président.
En réponse, la police a annoncé des déploiement supplémentaires dans tout le pays et indiqué qu'elle prendrait des mesures contre toute personne "incitant à la violence", dans ce pays d'Afrique australe où les manifestations sont rares et très contrôlées par les autorités.
Un journaliste qui a interviewé Blessed Geza en février a été arrêté après que les autorités ont affirmé que cet entretien pourrait inciter à la violence. Blessed Mhlanga est toujours derrière les barreaux, renforçant les accusations de répression croissante et d'étouffement de l'opposition politique par le pouvoir.
Tôt lundi, le centre de Harare était désert et les magasins, entreprises, services de transport et écoles sont restés fermés en prévision des manifestations.
"Les gens ont peur à cause des rumeurs qui circulent" concernant les manifestations, a confié un homme à l'AFP sous couvert d'anonymat.
A Bulawayo, les principaux commerces et bureaux étaient également fermés, seules quelques personnes circulaient et la police patrouillait en véhicules et à cheval, a constaté un journaliste de l'AFP.
La semaine dernière, le président Mnangagwa a démis de ses fonctions le chef de l'armée Anselem Nhamo Sanyatwe, et l'a nommé au poste considérablement moins stratégique de ministre des Sports, des Arts et de la Culture, une décision vue par certains comme révélatrice de ses craintes d'une possible mutinerie de ses forces armées.
M. Geza et sa faction de vétérans de la guerre qui a conduit à l'indépendance font pression pour remplacer le chef d'Etat par son vice-président, Constantino Chiwenga, un général à la retraite qui avait orchestré le coup d'État contre M. Mugabe en 2017.
C.Abatescianni--IM