Washington justifie l'envoi de mines antipersonnel à l'Ukraine pour stopper les avancées russes
La décision des Etats-Unis de fournir des mines antipersonnel à l'Ukraine s'explique par un changement de tactique de la Russie sur le champ de bataille, Moscou favorisant de plus en plus l'infanterie, a déclaré mercredi le secrétaire à la Défense Lloyd Austin.
"Leurs forces mécanisées ne sont plus en tête. Ils avancent à pied de manière à s'approcher et faire des choses pour ouvrir la voie aux forces mécanisées", a affirmé M. Austin aux journalistes lors d'une visite au Laos, pays longtemps ravagé par ce type d'armements.
Les Ukrainiens "ont besoin de choses qui peuvent aider à ralentir cet effort de la part des Russes", a-t-il ajouté au moment où l'avancée des troupes russes s'accélère dans l'est de l'Ukraine.
Ce revirement intervient quelques jours après que Washington a donné son feu vert à l'Ukraine pour frapper en territoire russe avec des missiles longue portée de fabrication américaine, utilisés dans la foulée par Kiev, une ligne rouge pour Moscou.
La Campagne internationale pour interdire les mines (ICBL) a immédiatement dénoncé mercredi une décision "désastreuse". Le groupe, prix Nobel de la paix en 1997, a affirmé qu'il "s'efforcera d'obtenir des Etats-Unis qu'ils reviennent sur leur décision".
Le président américain Joe Biden avait déclaré en 2022 qu'il en interdirait l'utilisation, sauf dans la péninsule coréenne, établissant à l'époque un contraste avec les tactiques russes en Ukraine.
Les Etats-Unis ne sont pas cependant signataires du traité d'interdiction des mines antipersonnel de l'ONU.
Le revirement de M. Biden intervient sur fond d'inquiétudes sur la poursuite du soutien américain à l'Ukraine une fois que le président élu Donald Trump sera entré en fonctions en janvier.
L'ancien président républicain a assuré qu'il était en mesure de mettre fin à la guerre provoquée par l'invasion russe de l'Ukraine en février 2022, en "24 heures".
- Mines "très différentes" -
Selon M. Austin, les mines fournies par les Etats-Unis seront "non persistantes" c'est-à-dire équipées d'un dispositif d'autodestruction ou d'autodésactivation, ce qui limiterait théoriquement les risques pour les civils.
Les mines antipersonnel dites "non persistantes" peuvent s'autodétruire ou devenir inactives après avoir perdu la charge de leur batterie.
Sur la défensive, le porte-parole du département d'Etat, Matthew Miller, a expliqué qu'il s'agissait de mines "très différentes" de celles déployées par la Russie.
"Les mines terrestres que les Russes ont déployées en Ukraine, et dont le nombre avoisine les deux millions, resteront une menace pendant des décennies."
Dans le cas des mines américaines, "la batterie s'épuisera (...) au maximum deux semaines après leur déploiement (...) de sorte qu'elles ne représentent plus une menace pour la population civile à la fin du conflit", selon lui.
Il a également avancé le fait que l'Ukraine devra "déminer à la fin du conflit" et que les mines américaines sont "faciles à détecter et à enlever".
L'administration Biden avait déjà été critiquée l'année dernière pour avoir fourni des armes à sous-munitions à l'Ukraine.
Le Laos, où M. Austin a fait ses déclarations, se remet encore des lourds bombardements américains pendant la guerre du Vietnam, qui a pris fin il y a cinquante ans.
Les mines antipersonnel sont des engins explosifs qui continuent à tuer et à mutiler des personnes longtemps après la fin des conflits.
H.Gallo--IM