Agriculteurs: troisième jour de mobilisation, le gouvernement condamne blocages et dégradations
La mobilisation des agriculteurs est entrée dans son troisième jour avec la Coordination rurale à la manoeuvre dans le Sud-Ouest et à la frontière espagnole, le gouvernement condamnant mercredi des dégradations et des blocages "pas acceptables" dans six départements mardi soir.
La ministre de l'Agriculture Annie Genevard a déclaré mercredi sur France 2 que les "actes de dégradation, de blocage à la frontière espagnole" à l'initiative de la Coordination rurale (CR), deuxième syndicat agricole, n'étaient "pas acceptables" et risquaient d'entamer la "sympathie" des Français envers la profession.
"S'en prendre aux biens, s'en prendre aux personnes, bloquer durablement le pays, ça n'est pas acceptable. Et je le dis aux membres de la Coordination rurale qui, dans six départements de France hier soir, se sont livrés à des actes de dégradation, de blocage à la frontière espagnole", a dit Mme Genevard, ajoutant que cela pouvait "dissiper" le "mouvement de sympathie que les Français ont pour les agriculteurs".
"Je pense que ce n'est pas raisonnable et ça ne sert pas la cause agricole", a-t-elle ajouté.
Sur l'autoroute A9 notamment, au péage du Boulou (Pyrénées-Orientales), des agriculteurs de la CR ont établi mardi un barrage, bloquant des camions de marchandises mais laissant passer les voitures, à une dizaine de kilomètres de la frontière espagnole.
"On va bloquer l'A9, mais aussi les dépôts de carburants, les ports, les centrales d'achat. On veut provoquer un chaos et une pénurie alimentaire", avait assuré Serge Bousquet-Cassagne, figure de ce syndicat dans le Sud-Ouest, présent au Boulou.
Sur l'A9, "fleuve de fruits et légumes qui arrivent d'Espagne", il avait dit envisager "un blocage durable (...) sur plusieurs jours".
- Débat sur l'accord Mercosur -
A Agen quelque 350 à 400 manifestants (chiffre de la police) s'étaient rassemblés mardi devant la préfecture, où du fumier et des déchets ont été déversés, tout comme devant la préfecture de Limoges, selon les autorités.
Une délégation avait été reçue en préfecture du Lot-de-Garonne. Mais faute d'avoir obtenu "des engagements forts" de la ministre de l'Agriculture, les deux responsables de la CR47, Karine Duc et José Perez, avaient refusé de quitter les lieux et ont finalement "dû être escortés par les forces de l’ordre, sans incident", a écrit la préfecture dans un communiqué publié après 23H00.
Les autorités signalent également un autre "point de blocage" toujours en place mercredi matin à Charleville-Mézières.
L'Office français de la biodiversité (OFB) a quant à lui dénoncé des "dégradations" de ses locaux dans l'Oise et la Creuse mardi.
Moins d'un an après une mobilisation historique, les syndicats agricoles estiment n'avoir pas obtenu suffisamment d'avancées.
Ils redoutent en plus une ratification prochaine d'un accord de libre-échange entre l'Union européenne et des pays latino-américains du Mercosur.
Mardi pourtant, après deux premières journées d'actions, l'alliance majoritaire FNSEA-Jeunes agriculteurs (JA) a salué "une première victoire" après l'annonce de la tenue d'un débat suivi d'un vote le 26 novembre à l'Assemblée nationale sur le traité de libre-échange, largement rejeté en l'état par la classe politique française.
"Nous sommes plusieurs pays importants de l'Europe qui ne sommes aujourd'hui pas prêts à signer cet accord en l'état", a également assuré Emmanuel Macron à la fin du sommet du G20 à Rio.
Mercredi matin, le patron de la FNSEA Arnaud Rousseau a toutefois annoncé sur franceinfo une nouvelle mobilisation de ses troupes "mardi, mercredi et jeudi" prochains.
L'alliance FNSEA-Jeunes agriculteurs a évité d'organiser des blocages comme l'an dernier, privilégiant des actions symboliques pour "ne pas ennuyer les Français".
- "Plus offensif" -
Selon les autorités, 30 actions ont été menées dans la nuit de mardi à mercredi, rassemblant 1.930 agriculteurs et 512 engins, sans incident ni interpellation.
De même source, la journée de mardi a été "marquée par la mobilisation du syndicat de la Coordination rurale démontrant un état d'esprit résolument plus offensif et déterminé que celui de la JA ou de la FDSEA", alors que la CR tient en parallèle son congrès national dans la Vienne, dont il préside la chambre d'agriculture depuis 2019.
Lors des prochaines élections professionnelles, prévues en janvier, la CR entend ravir d'autres chambres à l'alliance FNSEA-JA, à qui elle reproche notamment d'être trop proche de l'agro-industrie et des gouvernements successifs.
À défaut de réponses de l'État jugées satisfaisantes, le syndicat appelle à bloquer le fret alimentaire à partir de mercredi. Il pourrait notamment cibler des centrales d'achat de la grande distribution en Charente, dans les Landes ou dans le Tarn-et-Garonne.
A.Goretti--IM