Attentat islamiste: Arras "debout", avant un hommage national lundi
"Nous sommes debout": des milliers de personnes ont rendu hommage dimanche à Arras (Pas-de-Calais) à Dominique Bernard, le professeur de français poignardé à mort vendredi par un ancien élève radicalisé, avant une minute de silence nationale lundi pour les victimes des attentats contre l'école.
La place centrale de la ville était noire de monde: plus de 5.000 personnes selon la préfecture y étaient rassemblées, non loin de la cité scolaire Gambetta, théâtre de l'attaque islamiste survenue dans un contexte marqué par les craintes d'importation en France du conflit au Proche-Orient.
"Arras est à l'épreuve, mais Arras est debout, vous êtes debout, nous sommes debout", a lancé le maire divers centre, Frédéric Leturque, aux participants, certains aux yeux rougis.
Il a provoqué une onde de choc, en particulier chez les enseignants, alors que la France commémore lundi l'assasinat il y a trois ans de l'un des leurs, Samuel Paty, décapité le 16 octobre 2020 pour avoir montré des caricatures de Mahomet en classe.
Une minute de silence en hommage aux victimes d'attentats contre l'école est prévue dans tous les établissements scolaires à 14h.
"Il est insupportable d'avoir à revivre le même effroi", a lancé à la tribune Catherine Piecuch, co-secrétaire FSU pour le Nord et le Pas-de-Calais. "L'Etat doit prendre toutes les mesures pour assurer la protection des personnels et des élèves."
"Nous serons au rendez-vous pour assurer votre sécurité", avait promis dès samedi la Première ministre Elisabeth Borne aux enseignants.
- "Traumatisme" -
Le ministre de l'Education Gabriel Attal a annoncé le déploiement de 1.000 personnels de sécurité dans les établissements scolaires.
Lundi, les cours débuteront à 10H00 dans le secondaire, pour permettre "temps d'échange tout à la fois humain et pédagogique" entre enseignants à partir 08H00, avait-il ajouté.
Clothilde Mienville, enseignante en CE2 à Arras, ne sait "pas encore trop comment" aborder le sujet avec ses élèves, dont certains "choqués, traumatisés" ont des grands frères ou sœurs à Gambetta. "Il faut leur permettre d'extérioriser".
L'enseignant tué, Dominique Bernard, professeur agrégé de lettres modernes de 57 ans, était père de trois filles et marié à une enseignante.
La France, placée vendredi en alerte "urgence attentat", prévoit de déployer 7.000 soldats d'ici lundi sur le territoire.
Le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin, prônant l'"expulsion systématique de tout étranger (...) considéré comme dangereux par les services de renseignement", a évoqué un possible "lien" entre l'attaque et le conflit dévastateur en cours entre Israël et le Hamas.
Depuis son arrestation, l'assaillant, Mohammed Mogouchkov, qui aurait crié +Allah Akbar+ selon des témoins, "ne s'est pas expliqué", a indiqué à l'AFP une source policière. Huit autres personnes étaient encore en garde à vue dimanche.
- "Amalgame" -
Il était suivi depuis peu par la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), en raison, selon Gérald Darmanin, des liens avec son frère, emprisonné pour sa participation à un projet d'attentat visant l'Elysée, et avec son père, lui aussi fiché S, expulsé en 2018 et "très probablement" en Géorgie, selon une source policière.
La DGSI avait brièvement interpellé l'assaillant la veille des faits, notamment pour contrôler son téléphone, a précisé le ministre, qui exclut une "faille des services de renseignements".
"Rien dans les éléments qu'on avait pu obtenir ne permettait de prédire que cet individu (...) pouvait passer à l'acte", a renchéri Elisabeth Borne dans La Tribune Dimanche.
Arrivé en France en 2008 selon une source policière, il est né d'après l'administration française dans la république russe à majorité musulmane d'Ingouchie, mais ne pouvait légalement pas être expulsé, étant entré sur le territoire avant l'âge de 13 ans, a souligné Gérald Darmanin.
"L'ennemi, c'est le terrorisme islamiste. Il faut le cibler sans opérer d'amalgame", a estimé le député LFI de la Somme, François Ruffin, dimanche sur BFMTV.
Depuis l'attaque de Charlie Hebdo en janvier 2015 (12 morts) une vague d'attentats jihadistes a fait plus de 260 morts en France.
L.Bernardi--IM