Après la Finlande, la Suède annonce sa candidature à l'Otan et une "nouvelle ère"
Au lendemain de la Finlande, la Suède a officialisé lundi sa candidature à l'Otan, actant la bascule historique des deux pays non-alignés vers le giron de l'alliance, en conséquence directe de l'invasion russe de l'Ukraine.
Après près de deux siècles de neutralité puis de non-alignement militaire, "nous quittons une ère pour entrer dans une nouvelle", a souligné la Première ministre suédoise Magdalena Andersson lors d'une conférence de presse.
Stockholm s'attend à être membre d'ici un an maximum, a-t-elle affirmé alors que l'Otan tente de calmer une hostilité de dernière minute affichée par la Turquie.
L'unanimité et la ratification parlementaire des trente membres actuels de l'alliance est nécessaire pour faire entrer un nouveau membre.
La perspective d'une entrée suédo-finlandaise dans l'Otan "ne constitue pas une menace immédiate", a réagi lundi Vladimir Poutine, après plusieurs déclarations exprimant l'irritation de Moscou ces derniers jours.
Mais la Russie réagirait à des déploiements d'"infrastructures militaires" dans les deux pays nordiques, a averti le président russe.
La Première ministre suédoise avait mené lundi matin des discussions avec les chefs de partis au Parlement, pour constater qu'elle disposait d'une large majorité.
Avec la bascule historique du parti social-démocrate au pouvoir dimanche, six des huit partis au Parlement suédois sont désormais en faveur d'une adhésion, représentant une majorité théorique de 304 députés sur 349, soit plus de 85%.
Seuls les membres bénéficient du parapluie de l'Otan, pas les candidats, ce qui a poussé Stockholm et Helsinki à demander des assurances de sécurité à plusieurs pays de l'Alliance.
"La Suède va se retrouver dans une position vulnérable durant la période d'adhésion", a souligné Mme Andersson.
Les pays nordiques voisins - Norvège, Danemark et Islande, tous trois déjà membres de l'Otan - ont promis lundi d'assister la Suède et la Finlande "par tous les moyens nécessaires" en cas d'agression.
"Nous sommes voisins, nous sommes amis. Nous sommes impatients de devenir alliés au sein de l'Otan", a déclaré la dirigeante danoise, Mette Frederiksen.
Le président français Emmanuel Macron soutient "pleinement" la décision suédoise, a réagi l'Elysée.
- "Grave erreur" -
Pour Moscou en revanche, les candidatures de la Suède et de la Finlande à l'Otan en réaction à l'offensive russe contre l'Ukraine constituent une "grave erreur" dont "les conséquences auront une portée considérable", selon le vice-ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Riabkov.
Alors que le Kremlin a justifié son invasion de l'Ukraine par le risque d'extension de l'Otan à ses portes, une adhésion de la Finlande rallongera de quelque 1.300 kilomètres la frontière entre la Russie et les pays de l'alliance.
Avec la Suède en plus, la mer Baltique deviendrait un "lac Otan", en dehors des eaux russes au large de l'enclave russe de Kaliningrad et de Saint-Pétersbourg.
"Nous sommes convaincus que l'entrée dans l'Otan de la Finlande et de la Suède ne va ni renforcer ni améliorer l'architecture sécuritaire de notre continent", a affirmé lundi le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.
L'Eduskunta, le Parlement finlandais, mène lundi une session marathon pour examiner la candidature présentée officiellement dimanche par l'exécutif, avant un vote qui interviendra au plus tôt mardi.
Selon les derniers pointages des médias finlandais, au moins 85% des 200 élus vont voter oui.
"Le seul pays qui menace la sécurité européenne, et mène ouvertement une guerre d'agression, c'est la Russie", a affirmé la Première ministre finlandaise Sanna Marin en ouvrant les débats. "Notre environnement de sécurité a fondamentalement changé".
Du fait du grand nombre d'interventions prévues - plus de 150 - le vote ne pourra avoir lieu dès ce lundi, a prévenu le président de la chambre Matti Vanhanen.
Les candidatures formelles doivent être transmises au siège de l'Otan plus tard dans la semaine, Stockholm et Helsinki prévoyant une candidature simultanée, sans doute mercredi.
L'Otan avait assuré que les deux pays seraient accueillis "à bras ouverts", mais le président turc Recep Tayyip Erdogan est venu brouiller la perspective d'une unanimité sans difficulté, en se disant hostile à l'entrée suédo-finlandaise.
La Turquie leur reproche - surtout à Stockholm - de faire preuve d'une trop grande mansuétude vis-à-vis du Parti des travailleurs du Kurdistan, le PKK, bien qu'il soit sur la liste de l'UE des organisations terroristes.
Une délégation diplomatique suédoise va être envoyée pour "voir comment la question peut être résolue", a annoncé lundi le ministre suédois de la Défense Peter Hultqvist.
I.Pesaro--IM