Il Messaggiere - A la campagne, le blues des aides à domicile face à la hausse des prix du carburant

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A la campagne, le blues des aides à domicile face à la hausse des prix du carburant
A la campagne, le blues des aides à domicile face à la hausse des prix du carburant

A la campagne, le blues des aides à domicile face à la hausse des prix du carburant

"Travailler uniquement pour faire le plein de gasoil, c'est pas possible": Sylvie Rossignol, 56 ans, aide à domicile en milieu rural, subit de plein fouet la flambée des prix de l'essence, très douloureuse pour les salaires modestes.

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Sa voiture personnelle est son "outil de travail": chaque jour, elle parcourt une centaine de kilomètres dans la campagne auvergnate à bord de sa Dacia rouge pour visiter des personnes âgées ou malades, parfois très dépendantes, souvent isolées.

Depuis la hausse du prix du carburant, "le manque à gagner est énorme. On ne gagne pas notre vie, c'est de la survie! Sans compter les pneus neige l'hiver, la vidange, l'assurance, l'usure... Tout est pour notre pomme!", raconte-t-elle, gouailleuse.

Sa tournée du jour la conduit dans une ferme isolée, au bout d'une petite route de campagne, à Bromont-Lamothe (Puy-de-Dôme) chez Andrée, 85 ans.

L'agricultrice à la retraite refuse de prendre ses médicaments: "Dédé, les cachets, il faut les prendre, sinon vous allez être malade", tente Sylvie, mêlant douceur et fermeté.

"On y va, c'est moi qui vous emmène dans votre chambre. On y va toutes les deux, on va mettre la chemise de nuit", énumère patiemment la quinquagénaire dynamique, tout en aidant la vieille dame à se lever.

"J'aime les gens... Vous savez, quand on arrive et qu'ils nous disent : +Vous êtes notre rayon de soleil+, ça fait plaisir" raconte-t-elle entre deux trajets, avec son air jovial et ses yeux rieurs.

Avec un plein qui avoisine désormais les 100 euros, Sylvie n'attend jamais que son réservoir soit vide pour "éviter de payer trop à la fois".

Elle envisage de rogner sur les dépenses alimentaires: "parce qu'avec les autres factures, on n'a pas le choix!" dit-elle. La moitié seulement de ses trajets lui est remboursée, à 0,37 euro le kilomètre, car seule la distance entre chaque bénéficiaire est calculée.

- 600 km pour 38 heures de travail-

"Pourquoi ne pas détaxer le carburant pour les gens comme elle? Déjà qu'elles ne sont pas beaucoup payées...", estime Jean-Paul Duval, 71 ans, qui reçoit Sylvie quelques heures par semaine.

"Elle nous aide au quotidien dans les tâches que l'on ne peut pas faire nous-mêmes en raison de problèmes de santé et nous sommes bien contents de trouver quelqu'un qui vienne à domicile, surtout à la campagne!", relève-t-il.

Sylvie Rossignol bénéficie d'un contrat de 130 heures par mois, payées au Smic, un "privilège" selon elle. Car la plupart de ses collègues occupent des temps partiels, avec des revenus bien moindres, alors que la profession a du mal à recruter.

Valérie Chassin, 53 ans, travaille pour Natise, une entreprise privée de nettoyage à domicile située à Volvic (Puy-de-Dôme). En février, elle a parcouru plus de 600 km pour 38 heures d'intervention, et un salaire de 494,76 euros... indemnités kilométriques comprises, comme le précise sa fiche de paye consultée par l'AFP.

"Ca me donne envie de pleurer", témoigne celle qui envisage d'arrêter son activité: "à 22 centimes l'indemnité kilométrique, avec la hausse des prix du carburant, je ne vais pas pouvoir remplir mon réservoir encore longtemps".

Mais contrairement à Sylvie Rossignol, ses trajets sont rémunérés à partir du domicile, dès le premier bénéficiaire.

La hausse des prix "impacte forcément nos salariés, mais c'est l'Etat qui fixe le barème des prestations. Cela ne nous permet pas d'augmenter nos tarifs et de répercuter une hausse des indemnités kilométriques", répond Elise Lespinasse, directrice de Natise, assurant conduire des démarches au niveau départemental et national pour "obtenir un coup de pouce".

Sans attendre, l'Apamar, association qui emploie Sylvie Rossignol et oeuvre principalement en milieu rural, a décidé d'augmenter l'indemnité kilométrique de trois centimes pendant trois mois.

Pour Dominique Bernier, directeur de l'offre de service, "la profession souffre d'un manque de reconnaissance, alors que les actes de ces salariés sont indispensables. C'est un peu le monde du silence. Elles montent dans la voiture, font leur tournée en souriant, puis rentrent chez elles, sans bruit".

C.P.Ajello--IM