Brésil: Musk "préserve la liberté" d'expression, lance Bolsonaro
L'ancien président brésilien Jair Bolsonaro a estimé dimanche que le magnat Elon Musk "préserve la liberté" d'expression en dénonçant la censure du pouvoir judiciaire, et a appelé ses partisans à "se battre" pour défendre ce droit, lors d'un grand rassemblement dans la ville de Rio de Janeiro.
Musk "est un homme qui préserve vraiment la liberté pour nous tous", et qui "a eu le courage de montrer, avec des preuves, (...) où allait notre démocratie, combien de libertés ont déjà été perdues", a déclaré M. Bolsonaro devant l'emblématique plage de Copacabana.
À la demande de M. Bolsonaro, la foule a brandi des drapeaux brésiliens et applaudi avec enthousiasme le propriétaire de la plateforme X, anciennement Twitter, qui a affronté ces derniers jours le juge de la Cour suprême brésilienne Alexandre de Moraes, le qualifiant de "dictateur".
Au nom de la lutte contre la désinformation, M. Moraes a ordonné le blocage des comptes d'utilisateurs sur les plateformes internet, dont X, notamment après les tentatives des Bolsonaristes de discréditer le système de vote lors de la dernière campagne électorale.
Bolsonaro, 69 ans, a dénoncé "une dictature" et appelé ses partisans à "continuer le combat" pour défendre la liberté d'expression, "menacée" au Brésil.
"Agissons pacifiquement, pour défendre la démocratie, pour notre liberté, sans affiches ni banderoles", avait déclaré jeudi sur les réseaux sociaux l'ex-président (2019-2022).
Attentifs à ce mot d'ordre, de nombreux sympathisants portaient seulement le maillot de l'équipe nationale, enveloppés dans des drapeaux brésiliens.
"Je suis venue me battre pour ma liberté d'expression parce que nous n'avons plus ce droit. La Cour suprême a outrepassé toutes les limites (...) Je ne suis ici ni pour un parti ni pour une personne", a témoigné Daiana Mesquita, une responsable de communication de 38 ans.
- "Interdiction de mentir" -
Dans une lettre datée du 13 avril, les représentants de X au Brésil se sont toutefois engagés à se plier aux décisions de la Cour suprême.
La querelle a pris de l'ampleur dans les milieux politiques et juridiques. D'autres membres de la Cour suprême ont soutenu le magistrat.
Le président de gauche Luiz Inácio Lula da Silva, vainqueur contre M. Bolsonaro en octobre 2022, a déclaré sans faire directement allusion à M. Musk: "si je pouvais, je décréterais l'interdiction de mentir".
Le juge, qui a multiplié récemment les déclarations publiques, a observé vendredi que la justice brésilienne était habituée à "faire face aux marchands étrangers qui traitent le Brésil comme une colonie".
Les députés bolsonaristes accusent la Cour suprême d'être alignée sur le gouvernement de Lula et de saper la démocratie et les libertés.
Un comité de la Chambre des représentants américaine est même intervenu en publiant jeudi un épais rapport sur des décisions confidentielles du juge concernant X et d'autres plateformes.
La manifestation de dimanche intervient deux mois après une grande manifestation de M. Bolsonaro à Sao Paulo le 25 février.
En 2023, le Tribunal supérieur électoral (TSE), présidé par M. de Moraes, l'a condamné à huit ans d'inéligibilité pour avoir désinformé sur le système électoral brésilien.
Le juge avait déjà ordonné l'ouverture d'enquêtes contre M. Bolsonaro et ses proches quand celui-ci était président, ce qui lui a valu d'être traité de "canaille" par l'intéressé en 2021.
- "Fake news" -
Une autre enquête sous la responsabilité du magistrat tente d'établir si l'ex-président a été l'instigateur des émeutes du 8 janvier 2023 à Brasilia, quand des milliers de ses sympathisants, refusant d'accepter la victoire de Lula, ont saccagé les lieux de pouvoir.
M. Bolsonaro a été frappé le 8 février d'une interdiction de quitter le territoire dans le cadre d'une enquête sur une supposée "tentative de coup d'Etat" après sa défaite électorale de 2022.
Les enquêteurs ont évoqué un document où figurerait un projet de décret visant à "empêcher le président élu de façon légitime d'accéder au pouvoir", en convoquant de nouvelles élections et en faisant arrêter Alexandre de Moraes.
Ce projet de décret est "la plus grande fake news de l'histoire du Brésil", a dénoncé l'ex-président dans une vidéo du 6 avril appelant à manifester.
Il a toujours clamé son innocence, se disant victime d'une "persécution".
F.Lecce--IM