Boulimique dans le jeu vidéo, Microsoft veut racheter Activision pour 69 milliards de dollars
Microsoft s'était déjà constitué un empire sur le marché lucratif des jeux vidéo, et le géant des technologies compte aller encore plus loin avec l'acquisition annoncée d' Activision Blizzard, qui édite notamment "Call of Duty" et "Candy Crush", pour la somme astronomique de 68,7 milliards de dollars
Si la transaction est confirmée, il s'agira de la plus grosse acquisition du secteur, très loin devant le rachat de Zynga par Take-Two pour 12,7 milliards de dollars annoncé la semaine dernière.
"Faire tomber Activision Blizzard dans l'escarcelle de Microsoft Gaming, c'est une opération sensationnelle", a réagi Daniel Ahmad, analyste chez Niko Partners. "Et cela montre l'importance qu'a pris l'industrie des jeux dans le monde".
Ce serait le plus important rachat jamais réalisé par le groupe informatique de Redmond (dans l'Etat de Washington), bien devant celui de LinkedIn en 2016 pour 26,2 milliards de dollars.
Le montant peut sembler exorbitant dans l'absolu, mais "étant donné les atouts (d'Activision) et l'alignement des stratégies, c'est raisonnable", assure Shanti Bergel, un cofondateur de Transcend Fund.
"L'acquisition d'Activision va contribuer à faire démarrer les ambitions plus larges de Microsoft dans les jeux vidéo et sa migration vers le métavers, le jeu vidéo étant selon nous le premier secteur de monétisation du métavers", ajoute Dan Ives du cabinet Wedbush.
Univers parallèle accessible via la réalité virtuelle et la réalité augmentée, le métavers est décrit comme le futur d'internet par des géants de la tech, à commencer par Facebook. Le patron de Microsoft, Satya Nadella, a d'ailleurs mentionné lors de l'annonce de rachat que les jeux vidéo joueraient "un rôle déterminant" dans le développement du métavers.
- En ligne de mire, les jeux dans le cloud -
En absorbant Activision, Microsoft deviendrait le troisième plus gros acteur de l'industrie vidéoludique en termes de chiffre d'affaires derrière le chinois Tencent et le japonais Sony, fabricant de la PlayStation.
Le groupe, qui commercialise les consoles Xbox depuis 20 ans et possède de nombreux studios de développement, était déjà un poids lourd de ce marché estimé à 173,7 milliards de dollars.
Parmi ses faits d'armes récents, il s'est offert ZeniMax Media en septembre 2020 pour 7,5 milliards de dollars, derrière des franchises comme "Elder Scrolls", "Fallout" ou "Wolfenstein".
En 2014, il avait racheté pour 2,5 milliards de dollars le studio suédois Mojang, créateur de "Minecraft".
C'est surtout dans les jeux vidéo sur le "cloud" (informatique à distance) que Microsoft nourrit d'immenses ambitions.
L'entreprise a annoncé mardi que son service d'abonnement mensuel Xbox Game Pass, permettant d'accéder à une vaste bibliothèque de titres depuis sa console, avait franchi la barre des 25 millions d'utilisateurs.
"Xbox veut atteindre les trois milliards de joueurs à l'échelle mondiale", a affirmé sur Twitter Daniel Ahmad, analyste jeux vidéo pour Niko Partners. "Ils y arriveront grâce à une stratégie consistant à développer à la fois jeux en HD via le cloud et des jeux mobiles disponibles sur différents supports".
- Activision dans la tourmente -
L'expérience, le savoir-faire et les nombreux blockbusters d'Activision seront des atouts de taille pour Microsoft.
"La propriété intellectuelle d'Activision Blizzard est l'une des plus précieuses au monde grâce à +Call of Duty+ et de multiples autres jeux qui ont des clients extrêmement fidèles", explique Sophie Lund-Yates, analyste pour le gestionnaire de fonds Hargreaves Lansdown.
Pour Activision, le rachat est une aubaine potentielle alors que l'entreprise californienne fait face à une vague d'accusations pour des affaires de harcèlement sexuels et de discriminations.
Lundi, le groupe a confirmé à l'AFP avoir licencié 37 employés et pris des mesures disciplinaires à l'encontre de 44 autres depuis juillet après avoir reçu des plaintes pour comportement sexuel inapproprié.
Le PDG d'Activision, Bobby Kotick, fait l'objet d'une pétition, signée par près de 20% des quelques 9.500 salariés et réclamant son départ, pour avoir cherché à étouffer plusieurs affaires, dont des accusations de viol.
Dans le communiqué de mardi, Microsoft a indiqué que M. Kotick conserverait ses fonctions à la tête de l'entreprise, sans préciser s'il resterait à son poste une fois la transaction achevée.
L'acquisition, qui se fera sous la forme du rachat en espèces des titres d'Activision au prix unitaire de 95 dollars par action, est censée être conclue pendant l'exercice comptable 2023, soit entre juillet 2022 et juin 2023.
A Wall Street, le titre d'Activision grimpait de 25%, à 81,81 dollars vers 18H55 GMT. Il avait été suspendu peu avant l'ouverture de la séance après s'être envolé de plus 37%.
I.Barone--IM